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Si vous désirez continuer à travailler sur la Turquie, vous pouvez rejoindre le réseau d'action régional appelé TURKRAN. Pour plus de précisions, adressez-vous à la coordination Turquie, à Paris,le mardi de 14h à 19h au 01 49 23 11 63.
Nature du régime : Démocratie parlementaire. L'armée joue un rôle de garant de la Constitution et elle est intervenue à 3 reprises pour "restaurer l'ordre", en 1961, 1971 et 1980.
CHEF de l' ETAT : Suleyman Demirel
Premier ministre : Necmettin Erbakan
capitale : ANKARA
Population : 61,9 millions ( en 1995)
PIB/Habitant : 5 619 $
Espérance de vie : 66 ans
Analphabétisme : 17,7% (en 1994)
Manifestations des mères de "disparus" par M.
SWYNGEDAUW du groupe 248
Impressions de voyage à Istanbul par J. NICOLAS du
groupe 344
Modèle de lettre à envoyer au Premier Ministre de la Turquie.
Manifestations des mères de "disparus" par M. SWYNGEDAUW du groupe 248
79ème samedi des "mères du Samedi".
"Depuis le 14 mai 95, chaque semaine à Istanbul, place Galatasaray, les "mères du samedi" se réunissent en silence pour demander justice de "disparitions" bien souvent imputables à la police. Samedi à midi, observez donc une minute de silence.
Deux personnes d'un des trois groupes d'Amnesty Grenoble qui participent à la campagne Turquie, étaient à Istanbul le samedi 8 novembre, au 77ème sit-in de la place Galatasaray. Ils souhaitaient manifester leur amitié et celle de leur sous-groupe à ces mères qu'ils avaient rencontrées la veille. Trois remarques sur la manifestation elle-même:
1. La représentation policière était importante. Environ 70 policiers bottés, casqués, portant matraques et boucliers. (nous avons comptés les deux groupes qui sont repartis à la fin de la manifestation vers la place Taksim). Si le nombre nous a semblé important, on notera que les deux groupes armés sont restés le plus discret possible. Ils ne dépassent que rarement l'alignement de deux rues adjacentes. D'autres policiers, peu nombreux étaient de l'autre côté de la place. Leur manque de discrétion était évident; on pense à un manque de professionnalisme notoire.
2. Une première surprise attendait les voyageurs. Ils pensaient à une manifestation dont les hommes étaient relativement exclus, comme c'était le cas en Argentine. Ici, les hommes ne sont pas exclus, on voit même des enfants avec leurs parents. Même des étrangers sont acceptés, puisque reconnaissant l'un des grenoblois, l'une des participantes l'a invité à venir s'asseoir près d'elle. Cette hospitalité est fort agréable, surtout dans un pays où les femmes voire les jeunes filles en Tchador noir sont nettement plus nombreuses qu'il y a 8 ans.
3. Une seconde surprise, la qualité et la dignité de la manifestation. Vingt-cinq minutes de silence, cela peut paraître long. Le temps cependant n'a pas pesé. Des photos de disparus, leurs noms, des affiches sur un nouveau disparu; pratiquement pas de slogans. Cela produit un recueillement qui n'a rien à voir avec les bavardages de nombreuses manifestations.
On note encore la présence de nombreux photographes et cameramen. Certains portent un matériel de toute évidence de professionnels.
Ce compte- rendu a été rédigé avant lecture d'autres compte-rendus de manifestations. Il est évident qu'à des dates récentes l'ambiance n'était pas la même. La Chronique d'Amnesty d'octobre rend compte de la réunion du 11 mai 96, avec forte surveillance policière, la police filmait ostensiblement ceux qui venaient. Il y avait aussi de la part des organisateurs une forte utilisation du discours. Dans le même numéro, est raconté un sit-in de Juin de cette année, avec incroyable déploiement de policiers et de matériels blindés et de chars à eau. Le 22 Juin, les proches de disparus usèrent d'un subterfuge. Pour éviter les risques des manifestations précédentes, ils se transformèrent en passants et déposèrent quantité de fleurs que la presse, discrètement prévenue, se chargea de photographier.
Une belle imagination, donc. Et, une espérance: une hirondelle ne fait pas le printemps, mais la manifestation du 8 novembre semble proche de celle du samedi 26 octobre dont fait état "Le Monde" du 29 octobre 1996.
On remarquera aussi un accueil très extraordinaire des personnes rencontrées, aux droits de l'homme."
Fin du témoignage.
Manifestation des familles de "disparus" sur la place Galatasaray, à Istanbul
et campagne Turquie d'Amnesty International.
12 octobre 1995 : Amnesty International lance une action intitulée "les sentinelles de l'humanité". Il s'agit d'attirer l'attention sur le statut précaire de nombreux défenseurs des droits de l'homme dans le monde. Parmi eux, Mahmut Sakar , avocat turc, harcelé depuis plusieurs années parce qu'il est un des responsables de l'Association turque des droits de l'homme. En 1994, il a été notamment arrêté en raison de la publication par cette organisation , d'un rapport sur les droits fondamentaux; lui et sept autres détenus n'ont ensuite dû leur libération qu'à la réprobation de la communauté internationale et à la présence à leur procès de délégués d'Amnesty.
19 avril 1996,vendredi soir : Notre petit groupe de voyageurs CEVIED a rendez-vous, en compagnie de notre jeune guide turc d'origine kurde, au siège de l'Association des Droits de l'Homme de Turquie. Le CEVIED, Centre d ' Echange et de Voyage Internationaux pour études et développement, est une association loi 1901 (8 quai Mal J'offre -69002 LYON), dont le but est de faire découvrir des pays sous tous les aspects, et notamment d'approcher les réalités quotidiennes de leurs populations grâce à la rencontre de personnes ou associations responsables.
Pour la Turquie, un des voyages CEVIED 1996 fut une semaine de découverte d'Istanbul et de ses richesses culturelles, associée à la rencontre d'une journaliste du journal turcophone Cumhuriyet; d'une syndicaliste du syndicat Dish; d'un représentant d'une formation politique démocrate (qui a insisté auprès de nous sur la nécessaire main tendue de l'Europe vers la Turquie: le traité d'association à la communauté Européenne date de 1963!); et de militants des droits de l'homme.
Mais tout d'abord, comment ne pas parler d'Istanbul - qui prit d'abord les noms de Byzance et de de Constantinople - sans évoquer ses splendeurs architecturales, telles l'imposante basilique Sainte Sophie (6ème siècle), symbole vivant de la puissance byzantine à son apogée, ou à la Mosquée Bleue, avec ses six minarets et ses faïences bleues d'Iznik, dont le sultan Ahmet 1er avait voulu , au début du siècle, qu'elle fût l'égale du sanctuaire de la Mecque.
Ou encore, les "bazars", marchés couverts, tel le Bazar égyptien où l'on peut s'enivrer d'odeurs d'épices orientales. Car à Istanbul, on est bien sûr au carrefour de l'Orient et de l'Occident.
Et cette sensation de carrefour, comment mieux l'avoir qu'en déambulant dans les quartiers très divers de cette ville, où l'on côtoie alternativement hommes d'affaires pressés se rendant au bureau, et vieux stambouliotes allant fumer le narguilé ou bien ménagères achetant fruits et légumes sur les nombreux marchés de rue. Ou bien encore, en allant observer, du haut de la tour de Galata, le va-et-vient incessant des bateaux sur le Bosphore, reliant l'Europe et l'Asie.
Ainsi donc, après avoir encore flâné dans les rues animées de Galatasaray, nous nous retrouvons à 19h dans une salle de l'Association des droits de l'homme; au mur, est accrochée sous verre la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, en français !
Autour d'un thé, nous sommes reçus par le président de l'Association (Mahmut Sakar, évoqué plus haut, en est vice-président). Il rentre justement de Genève, où vient de se tenir la session annuelle de la Sous-Commission des Droits de l'Homme de l'ONU.
Malgré la répression qui sévit en Turquie, l' association, créée en 1986 et regroupant environ 12 000 membres dont 3 000 à Istanbul, dénonce ouvertement les violations des droits fondamentaux commises en Turquie, et assiste à certains procès. Nous pouvons mesurer notre chance de pouvoir militer en toute sécurité, alors que c'est loin d'être le cas de nos interlocuteurs!
Ce soir, dans ces locaux, c'est d'ailleurs la pleine effervescence, car l'association prépare une action d'envergure : un train spécial, qui doit conduire des intellectuels turcs depuis Istanbul jusqu'à Diyarbakir, pour proposer une solution pacifique au problème de la situation des kurdes à l'est de la Turquie : en particulier, une demande au gouvernement d'une reconnaissance culturelle de la spécificité kurde (enseignement de la langue, fêtes culturelles) et d'un arrêt de la répression, en échange d'un cessez-le-feu définitif de la part du PKK (Parti d'opposition armée).
20 avril, avion Istanbul - Paris : le journal anglophone "Turkish Daily News" publie une pleine page d'interview de Mahmut Sahar sur la situation des droits de l'homme en Turquie, avec sa photo et le titre suivant : "Sakar : no solution in the shadow of arms". Seul le soutien international permet une telle publication, car la répression continue...
Octobre 1996 : Amnesty international lance une campagne internationale sur la Turquie. En effet, en dépit des déclarations du gouvernement turc et de quelques progrès accomplis dans certains domaines (la Turquie a rejoint le 25 octobre 1994 les pays qui ont renoncé à appliquer la peine de mort, bien que celle-ci existe toujours dans la législation), la situation des droits fondamentaux s'est généralement détériorée au cours des dernières années. Les menaces intérieures et extérieures, réelles ou imaginaires, servent à légitimer les agissements funestes des forces de sécurité, tandis que plusieurs centaines de prisonniers et civils ont été tués entre 1993 et 1995 par les combattants des groupes armés d'opposition. Chaque samedi midi, les "mères du samedi" manifestent sur la place Galatasaray d'Istanbul pour dénoncer la "disparition" d'un de leurs proches, à l'instar de leurs devancières argentines, "les folles" de la Plaza de Mayo à Buenos Aires.
C'est pour renverser le cours des choses qu'Amnesty mène cette campagne. A titre d'exemple, un appel de protestation est lancé par rapport au cas de Sergy Kaya, une jeune fille de 15 ans, et de son frère de 16 ans, arrêtés dans la soirée du 8 février 1996 à leur domicile d'Istanbul. Ils sont détenus au secret à la prison de Sagmalcilar, à Istanbul, sous l'inculpation d'appartenance à une organisation illégale. Sergi Kaya affirme que tous les deux ont été torturés durant leurs douze jours de détention au secret. Un rapport de l'Institut médico-légal au sujet de l'examen médical de Sergi Kaya a constaté la présence d'ecchymoses à la plante des pieds et à la paume des mains.
Maurice Lemoine conclut son éditorial de la Chronique d'Amnesty d'octobre 1996 :" de nombreux turcs se demandent à juste titre si la communauté internationale exerce une pression suffisante sur leur gouvernement en vue de mettre un terme à leurs souffrances... Nous sommes convaincus que la négation de l' Autre et de l' Histoire constitue le plus grand des périls - là bas comme ici".
Fin du témoignage.
En novembre 1994, l'Union européenne, l'Autriche, la Finlande, la Norvège et la Suède ont fait une déclaration commune à Budapest, lors d'une réunion au sommet de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Ces pays ont exhorté la Turquie à inviter une mission de l'OSCE qui serait chargée d'observer la situation des droits de la personne dans le pays et de proposer des réformes. La Turquie a jusqu'à présent refusé d'accéder à cette demande.
Les membres de la communauté internationale devraient par ailleurs veiller à ce que des transferts d'équipement militaire et de sécurité ne favorisent pas les violations des droits fondamentaux. En effet, des véhicules blindés, des hélicoptères et d'autres avions ont été utilisés lors d'opérations lancées par les forces de sécurité dans le sud-est de la Turquie et au cours desquelles des violations des droits de la personne ont été commises. Des "disparus" ont été vus pour la dernière fois alors que des membres des forces de sécurité les faisaient monter à bord d'hélicoptères. L'Allemagne, les États-Unis, la France, le Royaume-Uni, la Russie et peut-être bientôt le Canada font partie des pays qui fournissent ce type de matériel à la Turquie. Amnesty prie instamment les gouvernements qui autorisent la livraison de matériel militaire et de sécurité à la Turquie de veiller à ce que celui-ci ne soit pas utilisé pour commettre des violations des droits fondamentaux.
De la torture aux disparitions
Les premières informations faisant état de disparitions en garde à vue en Turquie ont commencé à parvenir à Amnesty International il y a quatre ans. Depuis, le nombre de disparitions n'a cessé d'augmenter, malgré les mises en garde répétées adressées aux autorités. Plus de 50 cas ont été signalés en 1994.
Les villageois habitant les provinces du sud-est de la Turquie placées sous état d'urgence sont les principales victimes de violations. Mais le climat d'impunité dont bénéficient les soldats déployés dans cette région s'étend désormais aux policiers et aux autres membres des forces de sécurité dans tout le pays.
Les opposants politiques présumés ne sont pas les seules victimes d'actes de torture, des suspects de droit commun ont également subi des sévices.
Poursuite jusqu'en Irak
Face à l'offensive turque lancée fin mars dans le Kurdistan irakien et qualifiée par le gouvernement turc d'opération de maintien de l'ordre contre le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) -, Amnesty International a demandé que des mesures soient prises pour garantir la sécurité de tous les prisonniers et de tous les civils.
Selon des sources officielles, 35 000 soldats turcs appuyés par des chars d'assaut et des unités d'artillerie ont pénétré dans le Kurdistan irakien. Le but déclaré de cette opération était de détruire les camps du PKK sur une bande de territoire large d'une dizaine de kilomètres, le long de la frontière avec la Turquie.
L'Organisation n'a pas pris position sur la légalité de cette incursion ni sur les opérations de sécurité menées contre les camps du PKK. Cependant, des membres de la population civile locale auraient été faits prisonniers. Amnesty International dispose de nombreux renseignements sur la manière dont ont opéré les forces militaires et de sécurité turques lors d'offensives menées, sur le sol turc, contre des villages kurdes soupçonnés de soutenir le PKK. Ces opérations ont été conduites de manière particulièrement brutale et on dispose d'informations détaillées sur des cas de torture, de décès des suites de torture, de disparitions et d'exécutions extrajudiciaires de personnes détenues dans de telles circonstances.
Étant donné le mépris que le gouvernement turc affiche pour les droits de la personne sur son propre territoire, l'Organisation s'inquiète pour la sécurité des prisonniers dans le Kurdistan irakien. Elle lance un appel aux autorités turques pour qu'elles assurent la sécurité de toutes les personnes détenues et clarifient leur situation au regard de la loi.
Vous pouvez agir. Tout ce que vous ferez comptera. Faites connaître autour de vous les
informations que vous venez de lire. Participez à la grande campagne qu'Amnesty
International a lancée le 1er octobre 1996. Agissons ensemble contre la
torture et les disparitions.
Monsieur le Premier Ministre
J'ai l'honneur d'attirer votre attention sur les risques de tortures pour toute personne placée en garde à vue dans votre pays. En effet, ces tortures semblent être couramment pratiquées même sur des enfants. C'est ainsi que Dönc Talun, 12 ans, accusée d'avoir volé du pain, a été arrêtée en janvier 1995 et fut frappée et torturée à l'électricité au quartier général de la police d'Ankara. On peut aussi signaler le cas de Mahir Goktas, âgé de 14 ans, arrêté en décembre 1995 pour distribution de tracts. Cet enfant a été aussi torturé au quartier général de la police de Manisa. Il fut frappé par près de 10 policiers à la tête et au ventre et a reçu des décharges électriques à plusieurs endroits du corps.
Pour ces enfants, je m'associe à l'action entreprise par Amnesty International. Ce mouvement uvre pour la libération des prisonniers d'opinion, pour un jugement équitable des prisonniers politiques et pour l'abolition de la torture et de la peine de mort. Avec lui, je vous demande de donner des directives pour faire respecter la loi, pour que les parents soient rapidement informés de la détention de leurs enfants et puissent leur rendre visite. De plus, je vous demande que des sanctions soient appliquées si ces directives ne sont pas suivies. Enfin, je vous prie de m'informer de toute nouvelle information concernant les deux cas mentionnés.
Veuillez agréer, Monsieur le Premier Ministre, l'assurance de ma
haute considération.
Adressez vos lettre à :
M. Le Premier Ministre
Bureau du Premier Ministre
Babaskanlik
06573 ANKARA
TURQUIE
En sachant que celui-ci n'est pas contrôlé par Amnesty International. Il n'est qu'une porte ouverte vers ce pays.